FAR de Morlaix - Festival Arts de la Rue édition 2007

Les 3 Points de suspension - Voyage en Bordure du Bord du Bout du Monde

La famille Adams revisitée en mieux par les frères Grimox

Soyez les bienvenus dans cet article déconseillé aux enfants et aux personnes âgées. Pour cause, des scènes peu cathodiques y seront contées : travestissement et porte-jarretelles, actes suicidaires et kamikazes, scènes de violence, décapitations, incitation à la pornographie et au dépucelage…

Embarquement immédiat pour la Bordure du Bord du Bout du monde avec les frères Grimox qui ont eu la malchance de pêcher dans leurs filets la tête de Sophoclès. À cause d’une terrible malédiction, ils se trouvent à jamais condamnés à raconter toute l’histoire qui a mené ce philosophe à la décapitation.

À travers une mise en scène à multiples facettes et basée sur le principe du théâtre dans le théâtre, les frères Grimox nous font passer un moment follement drôle et décadent.

Le présumé frère aîné présente le spectacle vêtu de porte-jarretelles et muni d’un mini-mégaphone. Il semblerait avoir raté sa vocation et se prend pour Elvis ou quelconque crooner peut être… Parmi ses frères, l’un d’eux joue d’un orgue aux sonorités des films d’horreur des années 50, cela fait penser à Nosferatu le vampire… Les trois autres -un benêt, un beauf et un stoïque- sont postés à côté et entonnent la chansonnette. Le ton est annoncé, nous avons affaire à une sorte de famille Adams, mais beaucoup plus gaie…

Nous voilà donc plongés dans la terrible histoire du philosophe Sophoclès Il Filipo, jouée dans tous les sens du terme par les frères Grimox. Accusé d’avoir dépucelé la fille du Roi qu’il devait protéger, il se trouve condamné à la décapitation. Les cinq frères malchanceux et maladroits de surcroît, enchaînent les bourdes et parviennent laborieusement à jouer cette histoire. Gags, ratés et cascades alimentent la mise en scène basée sur la double vision donnée au spectateur : les comédiens jouent les frères Grimox qui eux-mêmes jouent l’histoire de Sophoclès.

Multiples péripéties et cascades inattendues alimentent le spectacle grâce aux cinq frères doués d’un art rare, celui de l’inconscience et du goût du risque ! Sur diverses musiques empruntées aux premiers sons électroniques des synthétiseurs des années 80, des scènes totalement loufoques et parodiques illustrent les mésaventures du philosophe : Décapitation, catapultage humain, course effrénée d’échasses, sauts du haut du décor, attaque de moulpes (monstre hybride né du mélange de la moule et du poulpe)…

Voyage au en Bordure du Bord du Bout du Monde nous offre un univers riche de références démodées et décalées dont on ne peut se lasser, surtout quand elles sont si bien exploitées. Saluons la performance des comédiens pour leur jeu et leur polyvalence quant aux nombreux registres mis en scène.

Texte : Carole Michel