Mai où iras-tu ?
Plouézoc'h, dernier rendez-vous du Mai des Arts dans la Rue 2006
« Par delà la rivière de Morlaix, nous tendons la main à Locquénolé, première commune à avoir accueilli le Mai des Arts dans la Rue. » C'est sur ces mots que l'adjointe au maire de Plouézoc'h a ouvert ce samedi 27 mai 2006 une belle soirée de spectacle.
Petit retour en arrière... Il y a 6 ans, le Mai des Arts faisait ses premiers heureux dans les communes du Pays de Morlaix. Echappé du copieux FAR estival et tout chaud couvé au Fourneau brestois, l'oeuf de Mai était pondu un 1er mai (2001) à quelques kilomètres de Plouézoc'h. Depuis ce jour, il a parcouru bien des communes et connu bien des succès. Mais vous me direz, l'oeuf est un objet fragile. Certes... Cependant il cesse de l'être lorsqu'il se chauffe de milliers de sourires. Il est alors frétillant, explosif et délicieux, se répandant comme une traînée de poule (pardon... de poudre!) dans tout un Pays.
Là encore vous me direz, mais pourquoi cette métaphore tirée par les poils du crâne (... d'oeuf) ? Pour la joyeuse et simple raison que ce 27 mai marque la fin du premier tour des 28 communes que compte le Pays de Morlaix, toutes les communes ayant accueilli le Mai des Arts dans leurs rues, sur leurs places, parfois dans leurs mairies, salles des fêtes ou dans leurs églises. Et pour célébrer ce moment particulier, rien de plus symbolique qu'une clef en chêne, synonyme de sagesse et de longévité, enfilée au trousseau du Mai. Mais qui peut dire que les arts ont été sages ce samedi dans les rues de Plouézoc'h ? Personne. Par contre, ils ont été turbulents, drôles, oniriques, sonores, clownesques, aériens, étonnants et magiques, et cela pour notre plus grand plaisir !
L'impertinence artistique, rencontrée ça et là pendant toute la soirée est peut être due à la jeunesse des créations présentées. En effet sur les 7 spectacles proposés, seul un n'était pas une fraîche création de l'année 2006.
Avec Baignade Interdite, les comédiens de la compagnie Bris de Banane n'en sont effectivement pas à leur premier coup d'éclats. Pourtant, le succès est toujours au rendez-vous pour ce trio de mime efficace. Sans parole et à l'aide de quelques accessoires bricolés, ces trois personnages benêts plongent sans bouée dans des aventures aquatiques rocambolesques.
La mise en scène de ce petit spectacle de 30 minutes se nourrit d'effets visuels séduisants, amenés avec astuce et rigueur mimique : de la mise à l'eau, jusqu'à la fin tragi-comique prévisible où le baigneur se retrouve dans les entrailles d'un requin-valise. En même temps, il était prévenu : Baignade Interdite !
L'autre plongée de la soirée aura été celle que Paul Fischer, alias Schaul Pifer, a effectuée en tenue de poilu de la guerre 14-18. La toute première sortie du spectacle Entre le marteau et l'enclume aura été un bon test pour les trois comédiens de la compagnie, toujours en cours de recherche : « On est parti trop rapidement au début, ... , on aurait dû diffuser ce son là à ce moment là, ... ». On aurait dû faire comme-ci, ou comme-ça... Le Mai c'est aussi ça, l'occasion pour tous ces artistes de faire évoluer leur spectacle, de répondre à des questionnements auxquels seules les réactions du public peuvent apporter une réponse.
Une chose est sûre, l'image finale de cette déambulation sonore en aura touché plus d'un. Perché sur un promontoire, le soldat Pifer s'est figé dans une ultime position de gloire avec à ses pieds un écriteau commémoratif sur lequel on pouvait lire : « Et s'ils faisaient une guerre et que personne n'y allait. »
Le Mai des Arts à Plouézoc'h était aussi l'occasion de retrouver le duo de marionnettes Trois par la compagnie Une de Plus. Conseillés par Olivier Germser, danseur-chorégraphe de la compagnie Tango Sumo, les deux comédiens de la compagnie ont profité de leur résidence en Pays de Morlaix pour améliorer certains passages du spectacle. Le résultat de ces journées de travail est plus que positif : plus de fluidité dans les déplacements et les enchaînements, et une technique contraignante qui se fait oublier progressivement pour mieux laisser place à la magie de l'instant.
Dans Le Son de l'Homme bambou, le clarinettiste Michel Aumont instaure un dialogue avec le danseur-manipulateur Maskus Schmid. A eux deux, ils créent un univers onirique dans lequel le mouvement fait corps avec la musique. Tantôt mystique, tantôt comique, le spectacle est porté par une technique sonore impressionnante : amplis HF en forme de touret que les deux artistes font rouler et empilent à loisir, utilisation d'un sampleur pour mélanger différentes phrases musicales et de la stéréo pour plonger les spectateurs au coeur de l'univers sonore. Envoûtant...
A Plouézoc'h, il y avait également les Paper Men de la compagnie brestoise Dérézo. Les étranges samouraïs sculpteurs de papier ont déambulé une deuxième fois en Pays de Morlaix après leur résidence à Botsorhel et un passage la semaine dernière à Plouégat-Moysan.
Egalement présente ce samedi, la compagnie Atro Téotr' a présenté à deux reprises sa nouvelle création Les Porte-Mentals. Ce spectacle met en scène deux comédiens-danseurs dans un décor en forme de porte-manteau géant.
Enfin en clôture de soirée, Le P'tit Cirk originaire des Côtes d'Armor a ravi le public tout âge confondu avec son cirque intimiste Tok dans lequel le comique prime sur la prouesse et où le clownesque est partout. Mais méfiez vous, car ils ont l'air de rigolos comme ça mais quand vient le moment de s'envoler dans les airs pour un duo de voltige, la technique et le talent sont là et bien là!
Le Mai des Arts dans la Rue, c'était en 2001 à Locquénolé, Plougonven, Saint Martin des Champs, Lanmeur et Saint Thégonnec; en 2002 à Carantec, Lannéanou, Pleyber-Christ, Plourin-lès-Morlaix et Plouégat-Guerrand; en 2003 à Henvic, Guerlesquin, Loc Eguiner Saint Thégonnec, Saint Jean du Doigt et Sainte Sève; en 2004 au Ponthou, à Taulé, Plounéour Ménez, Ploujean et Locquirec; en 2005 à Garlan, Botsorhel, Plougasnou et Plouigneau; en 2006 au Cloître Saint-Thégonnec, à Guimaëc, Plouégat-Moysan et Plouzaoc'h.
Le Mai des Arts, c'est 6 années de fête, 28 rendez-vous, 6 années de spectacles et une équipe de près de 20 personnes, programmateurs, techniciens, coordinateurs, professionnels du multimédia. Le Mai des Arts, ce sont 12 résidences d'artistes, cent compagnies invitées pour plus de 150 représentations, plus de 100 associations locales mobilisées, 6 750 minutes d'émotion partagée, près de 28 700 spectateurs, soit 10 000 saucisses-frites dégustées, 42 000 minutes de rire et 150 millions d'applaudissements (en nombre de frappement de mains). Le Mai des Arts dans la Rue, c'est un Pays tout entier qui a vibré et qui vibrera encore longtemps...
La résidence de Dérézo au Fourneau et à Botsorhel
La résidence de Une de Plus à Taulé
La résidence de Schaul Piffer au Fourneau
