Bienvenue dans le théâtre à ciel ouvert de la compagnie Babylone. Les impressionnants gradins de métal disposés en cercle sur la place Cassin délimitent l'espace de jeu. Dans les coulisses, installées sous les gradins, les comédiens se préparent sous le regard des curieux. Et soudain, tout s'emballe... En quelques secondes, l'espace se remplit d'une multitude de comédiens et on entre de plein fouet dans une scène de commedia dell'arte.

Mais rapidement, la compagnie assène une première rupture au spectacle, une rupture de rythme, d'époque et de personnages. Une infirmière en blouse blanche, suivie par un médecin, font leur apparition. On se retrouve alors dans une maison de retraite en compagnie d'une bande de vieux artistes.

La suite du spectacle est un enchaînement continuel de délires et de réalités, à tel point que plus l'histoire s'accélère, moins on sait ce qui doit ou ne doit pas être vrai. Plongé dans l'esprit délirant de ces petits vieux, le spectateur est balancé inlassablement entre hallucinations et réalité. Tout se brouille et s'entremêle. Les souvenirs des patients prennent vie à travers différentes scènes. Il fallait bien une histoire comme celle-ci pour donner libre court au débordement d'imagination de la compagnie. Cette dernière s'en donne d'ailleurs à cœur joie, excellant dans l'art de la multiplication des lieux, des personnages et des ambiances.

Sur scène, on assiste notamment à une scène d'une pièce de théâtre qui sera interrompue par les huissiers venus saisir décors et costumes de la compagnie, renforçant encore un peu plus le principe d'univers avec plusieurs niveaux de réalités, comme des poupées russes qui s'emboîtent les unes dans les autres. Il y a alors l'action de la pièce jouée, celle de l'histoire de la compagnie qui l'interprète, celle de l'ancien artiste de l'hôpital se rappelant cette scène et une dernière qui englobe tout, celle des comédiens de Babylone donnant vie à cette histoire rocambolesque.
Les Vieux Démons est un vrai bonheur de théâtre, une leçon de comédie : humaine, sincère et sans limite. Au delà de la conscience d'être un personnage, l'art de Babylone repose sur l'indispensable conscience d'être un comédien.

Texte : Aurélien Marteaux
Photos : lefourneau.com